En tant que photographe objectiviste conceptuel rien n’empêche Francis Meunier de s’intéresser à la symbolique chrétienne même si, de prime abord, le lien semble distendu. La croix latine, en tant que symbole de reconnaissance pour les chrétiens d’occident, est une chose (un objet) représentant un concept (le sacrifice du Christ pour l’humanité).
D’aucun pense que le martyr de Jésus c’est de l’histoire ancienne, que depuis le XIXe siècle et la mort proclamée de Dieu par certains philosophes l’homme est passé à autre chose. Et pourtant. L’un des rôles de l’art n’est-il pas de transformer une idée métaphysique en une reproduction sélective de la réalité (celle-ci existant indépendamment de l’esprit de l’observateur pour tout vrai objectiviste), dans une forme physique objectivée, qui puisse être perçue au point de générer une réponse émotionnelle ?
La croix relève donc bien du concept en tant que représentation abstraite d’un objet (le cadavre du Christ) mais aussi bien d’une action (le supplice) ou encore d’un sujet (le Christ). C’est toutefois le hasard de la reconnaissance fortuite, et non pas le désir de disserter sur la religion, qui est à l’origine de cette série ; la fréquence de ces rencontres interrogeant tout de même le photographe.
Il est tentant de poser une intentionnalité dans ces images, comme une imprégnation inconsciente de la symbolique chrétienne pour celui qui dessine des croix essentiellement utilitaires (parfois même afin de planter des clous dans le sol), ou une tentative d’infiltration subliminale des esprits par le biais de signes cachés. Sans aller aussi loin ces croix forment un sujet intéressant en tant qu’objet photographique conceptuel.
Cette série se composera exactement de 33 vues, allez savoir pourquoi ?